PAS ASSEZ (EP)

Sortie le 6 juin 2025

Lancelot, un garçon pas comme les autres …

Commençons par le commencement. Un nom d’artiste qui est aussi son vrai prénom. Lancelot, dont la consonnance forcément chevaleresque, à l’origine exprimait le courage et l’humilité du chevalier de la table ronde a ainsi trouvé un héritier qu’il n’attendait plus.

 

Un garçon pas comme les autres, bien dans son époque, capable d’afficher et revendiquer les nouveaux contours d’une nouvelle masculinité bouleversante. Auteur, compositeur, interprète, Lancelot, dont toutes les blessures sont construites dans son imaginaire, n’a pas trouvé un autre destin pour elles, que de les transformer en chansons.

 

Un garçon pas comme les autres, parce qu’il faut avec lui se méfier des apparences. Il aurait pu devenir champion de tennis, numéro 1 mondial de préférence, mais qui, mu par son irrépressible lucidité, a tout à coup compris qu’il serait peut-être plus juste de se rêver en rock star.

 

Un garçon pas comme les autres, donc à priori ambitieux, mais qui lorsqu’il écrit et nous exprime en chanson d’entrée sa religion de la « flemme », nous éloigne d’un winner qui voudrait gouverner son monde. Avec ce tendre aveu en plus, de nous livrer avoir le cœur d’un amoureux qui bat les blancs en neige. Pour ce garçon qui a vécu et appris à respirer en haute altitude (l’Alpe d’Huez), et qui fut conditionné dès son plus jeune âge par l’ivresse des sommets, voici donc un premier délicieux paradoxe. Les mots de ses chansons vont se nourrir à sa réalité intérieure : une humilité constante et la nonchalance élevée au rang de religion pour ne pas se laisser abimer par la vitesse. Pour Lancelot c’est une manière de se protéger et d’emblée d’annoncer aussi la couleur en choisissant le titre de son EP : « Pas assez ». Il y a presque tout dans ce choix. Cette volonté de dire à tout le monde que dans une société cimentée par la performance, la rivalité, et le nombre de followers (qui ont remplacé vos amis), on peut s’immiscer dans une troisième voix : celle du « pas assez ». Comme de se dire que l’on est toujours le « pas assez « de quelqu’un, ou quelque chose.

 

Un garçon pas comme les autres, Lancelot, terre de contrastes, à flanc d’une montagne d’humanité. Produisant ainsi une musique dans une forme de cool attitude absolue, née sous le ciel de ce satané mercure rétrograde. On n’écrit pas « My way » d’un coup d’un seul, lorsqu’on avance et on recule face à ses lacunes. Bouleversante lucidité de Lancelot débutant. Et pourtant là encore, faisons fi de l’apparente couleur de ses mélodies à la mélancolie heureuse, pour découvrir un musicien dont l’instrument fétiche est la batterie. Un rythmicien né, est logiquement un homme qui rythme sa musique, et donc son inspiration à la testostérone naturelle du batteur. Et bien non. Lancelot vit rythmiquement mais tient à maitriser sa monture. Le « boum boum » qu’il préfère c’est celui qui bat sous la cage thoracique de son amoureuse. Ralentir le BPM de peur que l’on s’épuise. Revendiquer être un bon à rien, mais qui promet tout. Vaste contraste encore. Promettre tout évidemment, pour Lancelot, cela signifie beaucoup, en termes d’exigences pour sa musique et ses amours. Dans le même temps, il s’agit aussi de s’affranchir de toutes ses références pour inventer sa singularité dans un monde où l’on passe son temps à dupliquer les recettes musicales qui font la tendance.

 

Un garçon pas comme les autres, Lancelot, vingtenaire bien assis dans son époque, sourit doucement lorsqu’on lui parle de ses références musicales qui ont pu forger son projet : « je n’aimais que les chanteurs morts ou cancel ». Il y a ceux qui commencent à s’amuser avec les mots, grâce aux lectures de leur enfance et adolescence. Lancelot, son petit livre rouge à lui, ce sera l’ensemble du répertoire des chansons de Georges Brassens. De l’âge de 10 ans à 14 ans il n’écoute que ça. Qui l’eut cru ? Lancelot esthète des paradoxes. Il assimile ainsi l’humilité du style Brassens, son intégrité et son sens de la simplicité parfois cachée par la rigueur de la forme. Il y aura aussi Brel, Mouloudji et pour bien signifier que Lancelot n’est pas l’homme fait d’un seul bois : Claude François. Sans doute, pour la légèreté apparente, le maniaque du travail bien fait, l’entertainer star pionnier. Avant bien sûr de réaliser que l’homme était l’exact opposé de ce que Lancelot propose d’imposer aujourd’hui avec d’autres : un nouveau modèle de masculinité, sans jamais vouloir donner de leçon ou paraitre exemplaire.

 

Un garçon pas comme les autres donc, ce Lancelot qui possède l’apparence physique du jeune homme à qui logiquement rien ne peut lui résister. Beau comme un astre, sexy sans le montrer, mais aussi et surtout timide à l’excès. Beau, sexy, réservé cela se transforme assez vite par jalousie sans doute par un profil hautain ou suffisant, pour celles et ceux qui le regardent sans l’écouter. Lancelot jeune, en a eu très vite conscience. Alors la musique est venue à lui pour lui offrir un motif de transformation. C’est aussi cela le sens de ce deuxième EP « Pas assez » qui vient là précisément, pour contredire cette posture d’homme puissant. Ces six chansons sont l’expression même de ce nouveau modèle que Lancelot impose ici. Un homme au visage androgyne, qui pleure des larmes de paillettes. « Je veux faire le bien, mais je le fais mal, c’est peut-être parce que je n’ai pas trouvé ma place. Je déteste les hommes parce que j’ai tellement peur de leur ressembler, du coup je me maquille je me déguise… » C’est sa « vérité », titre de la plus belle chanson du disque.

 

Un garçon pas comme les autres, Lancelot aujourd’hui connait le prix du sacrifice pour être écouté et non pas seulement entendu. Un musicien qui ne se rêvait pas chanteur mais plus justement raconteur, slameur, l‘apôtre d’une chanson qui se dit plus qu’elle ne se chante…Et soudain, la révélation intime que pour bien projeter ses mots il fallait les chanter. Lancelot s’est découvert une voix. Une voix de bas ventre dans une gorge de velours. C’est l’un des atouts singuliers diablement sexy de l’artiste qui après avoir pris des cours de chant a finalement réalisé que l’épreuve du chant ressemblait à celle du feu. Un examen sans concession vers la mise à nu de sa propre psyché.

 

Un garçon pas comme les autres, dès lors Lancelot pourraient briller dans le seul pays des loosers magnifiques, le visage mouillé de larmes étoilées sur l’épaule réconfortante et joyeuse de Jim Carrey. D’aucuns diront que c’est un projet de vie « pas assez » ambitieux. Méfiez-vous alors des seconds. Ils finissent toujours un jour par être les premiers, car plus que tous les autres ils savent que « où la volonté est grande, les difficultés diminuent. » C’est le prince Machiavel qui écrivit cela. Lancelot, pour le coup assez chevaleresque mais sans être adepte de Machiavel impose ainsi avec ce premier EP, une philosophie des fragments amoureux qui rend Roland Barthes plus contemporain que nul n’aurait imaginé.

 

Un garçon pas comme les autres, Lancelot chanteur nonchalant et pour l’heure sciemment dégagé du champ politique, mais qui tout à coup écrit la bande originale d’une nouvelle ère où l’on pourrait même avoir envie de sauver un bijou précieux 100 carats, vestige de ce monde qu’il s’emploie à sa manière d’enfouir le plus vite possible

 

Un garçon pas comme les autres, Lancelot, créateur de repères pour ce nouveau monde peuplé d’hommes et de femmes « pas assez » dont il est désormais le chevalier, notre guide courtois « guéri », qui à l’écoute de ce nouvel EP nous conduit vers notre propre guérison.